UNION CONFÉDÉRALE CFDT DES RETRAITÉS

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Lip, il y a cinquante ans 1/2


Le 29 septembre 1973, la « marche des 100 000 » à Besançon marque l’apogée d’un mouvement social de grande ampleur qui reste, cinquante ans après, dans les mémoires de beaucoup de militants CFDT.

Un peu d’histoire. L’entreprise tient son nom d’Emmanuel Lipmann qui, en 1867, crée un atelier d’horlogerie à Besançon. Son petit-fils, Fred, devient, en 1945, PDG de l’usine Lip, qui produit alors 50 000 montres par an, chiffre qui passera, en 1960 avec la mise au point de la montre électronique à pile, à 600 000, sur le site de Palente.

« On fabrique, on vend et on se paie. »

Face à la concurrence de la montre à quartz, le déficit de l’entreprise – qui compte plus de 1 300 personnes – s’élève, en 1972, à 11 millions de francs. Les deux administrateurs provisoires choisissent de rechercher de nouveaux partenaires pour la société horlogère, mais les firmes contactées se récusent.

Face à la menace de licenciements, le personnel, syndiqué majoritairement à la CFDT, propose une diminution de la production. Ce mouvement s’amplifie lorsque les administrateurs annoncent que les salariés ne seront plus payés à partir du 17 juin 1973 et que le dépôt de bilan est envisagé. La décision d’occuper l’usine et de saisir un stock de montres est alors prise. Le 18 juin, les travailleurs remettent en marche la production de montres et en assurent la vente : « on fabrique, on vend et on se paie. »

Le 1er août, le tribunal de commerce prononce la liquidation des biens de Lip. Le 2 août, Jean Charbonnel, ministre du Développement industriel et scientifique, propose un plan gouvernemental qui prévoit le licenciement de plus de cinq cents salariés et le démantèlement de l’entreprise.

La grande marche des Lip

L’annonce de ce plan ne fait qu’encourager la poursuite de l’action. Le 4 août, les salariés procèdent à ce qui sera qualifié de « paie sauvage ». Le 7 août, une nouvelle entrevue avec les salariés tourne court. La cour d’appel de Besançon ordonne l’évacuation de l’usine, décision suivie le 14 août par l’intervention des gendarmes mobiles, et le 29 septembre a lieu la « grande marche des Lip », qui réunit plus de 100 000 manifestants à Besançon.

Pendant ce temps, les salariés poursuivent la fabrication des montres dans des ateliers tenus secrets. Ce conflit, emblématique de l’autogestion, durera jusqu’en janvier 1974. C’est à cette date que sont signés les accords de Dole qui permettent la relance de Lip sous la direction de Claude Neuschwander et la création de la Compagnie européenne d’horlogerie (CEH). Cette relance sera de courte durée. Le 3 mai 1976, la CEH est mise en liquidation et le personnel est licencié.

L’histoire n’est pas finie pour autant. L’action dans l’usine se poursuit, la fabrication reprend. Le 28 novembre 1977, les Lip créent six coopératives, dont Les industries de Palente, où on retrouve les initiales LIP. S’ensuivent plusieurs rachats, une délocalisation dans le Gers à Lectoure, et enfin la création d’un nouvel atelier d’assemblage près de Besançon, encore existant aujourd’hui.

[Annie Kuhnmunch

Un anniversaire largement célébré à Besançon

Deux expositions
« Lip.ologie, LIP une histoire horlogère » retraçant l’histoire de cette entreprise au musée du Temps, du 17 novembre 2023 à fin juin 2024.
« Au cœur de Lip : regards croisés sur un conflit contemporain » relatant les événements de 1973 et les itinéraires de femmes et d’hommes connus ou oubliés, aux archives départementales du Doubs, du 12 septembre 2023 au 12 avril 2024.
Un colloque
« L’affaire Lip cinquante ans après » organisé par l’Université de Franche-Comté, du 6 au 18 novembre 2023.
Une rencontre CFDT
« Lip ça change une vie sur le moment et après » qui retracera les parcours de militants CFDT de Lip, le 22 novembre 2023.